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Joseph de la Nativité


En taisant tout ce qui aurait aidé à camper le personnage de Joseph et à fournir quelques indices de sa personnalité, les évangiles se sont conformés à un double trait de sa personnalité: un homme de silence et de contemplation. Même si son nom figure 14 fois dans les récits évangéliques, aucune de ses paroles n'a été retenue. Marie, son épouse, fait aussi partie de ces êtres silencieux mais quelques phrases brèves ont cependant été recueillies. Phrases lourdes de sens et d'histoire. Joseph, lui, ne déserre jamais les lèvres. Tout laisse à penser qu'il était envahi par le mystère et que, à l'instar de Marie, il gardait lui aussi, toutes ces choses dans son cœur pour mieux les contempler (Luc 2, 51). C'était sa manière à lui d'en sonder la profondeur.

LA LOI OBLIGE JOSEPH À SE SÉPARER DE MARIE...
«Joseph, son mari, qui était un homme juste, et ne voulait pas dénoncer Marie publiquement, résolut de la répudier sans bruit» (Mt 1, 19). «Sans bruit» voilà l'expression qui convient à Joseph! Pas d'éclat, pas d'esclandre. Joseph ne fait que suivre la pente douce de son cœur. Il est ajusté à la volonté de Dieu. Il n'en discute pas les desseins. Il ne fait que les accomplir. Il va sans dire que la situation de sa jeune fiancée le met dans l'embarras. Surtout lorsque l'on connaît le sort réservé aux femmes qui deviennent enceintes avant les épousailles officielles, il y a de quoi frémir pour la vierge Marie. La Loi était implacable: la répudiation suivie de la lapidation.

LE CIEL LE RASSURE...
«Alors qu'il avait formé ce dessein, voici que l'Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit: Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ta femme: car ce qui est né en elle vient de l’Esprit Saint » (Mt 1,20).

C’est dans la foi que Joseph accueille la Révélation du mystère de la conception virginale de Jésus. Ajoutons que ce fut probablement aussi dans la joie que cet accueil fut reçu car Joseph aimait sa fiancée. Il rêvait d’en faire son épouse pour la vie. Quelle cruelle décision que de répudier, ne serait-ce que « sans bruit ». Quand on aime, on veut garder près de soi l’être aié. On veut s'engager sur le chemin de la vie avec cette personnel sans qui, justement, cette même vie perd tout son sens immédiat et futur.

JOSEPH AMÈNE CHEZ LUI SA BIEN-AIMÉE
«Elle enfantera un fils, et tu l'appelleras du nom de Jésus: car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ». Une fois réveillé, Joseph fit comme l'Ange lui avait prescrit.. il prit chez lui sa femme» (Mt 1, 21).

L'Ange du Seigneur atteste qu'aux yeux des hommes Joseph sera bel et bien le père de cet enfant, de cet Emmanuel dont le nom signifie: «Dieu avec nous».

LES GRANDS VIENNENT ADORER…
«Voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem en disant: Où est le roi des Juifs qui vient de naître?» (Mt 2, 1-2).

Aux bergers du récit de Luc, nous passons aux mages mentionnés dans le récit de Matthieu. Ces Orientaux s'arrêtent en cours de route pour s'enquérir de cette naissance insolite. Halte fatale! Elle donnera lieu au pire massacre du règne d'Hérode. Joseph doit faire vite! Fini les longues méditations auprès de son petit. Terminées les interminables veilles où Marie lui fait part des merveilles du Seigneur. Terminées aussi les heures bénies où ils scrutent, à deux, les Écritures pour en deviner les trésors et essayer d'en interpréter les prophéties et d'en déchiffrer les oracles concernant le Messie... Un roi se sent menacé par un nourrisson. Quelle royauté dérisoire! Quel pouvoir peut posséder la faiblesse!

DEVANT LA FOLIE MEURTRIÈRE JOSEPH DOIT FUIR...
«Après leur départ, voici que l'Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit: Lève-toi, prends l'enfant et sa mère, et fuis en Égypte car Hérode va rechercher l'enfant pour le faire mourir» (Mt 2, 13).

Joseph est contraint de fuir. Il apporte avec lui ses deux trésors: l'enfant et sa mère. Il ira où ses pères ont trouvé refuge. Il ira où la liberté se vit au sein d'un peuple étranger. Cruel destin que celui de ce descendant de David. Mais n'est-il pas prouvé qu'être libre est avant tout affaire d'intériorité? Joseph vivra encore quelques années d'un bien-être relatif avant que ne s'accomplisse l'oracle du prophète: «D'Égypte j'ai appelé mon fils» (Osée 11, 1). Et le texte précise: «et il y resta (en Égypte) jusqu'à la mort d'Hérode» (Mt 2, 15).

LE CIEL PARLE ENCORE...
«Voici que l'Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit: Lève-toi, prends l'enfant et sa mère et mets-toi en route vers la terre d'Israël» (Mt 2, 19-20).

Ce message de l'Ange du Seigneur vient clore l'émouvante chanson de geste de Joseph, le silencieux. Ce silence n'en est pas un qui empêche d'agir. Au contraire! Le silence est le fait des grands attentifs. De ceux à qui rien n'échappe d'essentiel. Ils ont les yeux tournés vers l'intérieur là où les moindres signes de Dieu sont perçus et saisis...

Joseph de la Nativité serait, à mon sens, l'expression la plus cohérente pour rendre compte de son rôle auprès de Jésus et de Marie. Car tout ce que l'on sait de lui surgit de l'insondable mystère de l'Incarnation du Fils de Dieu dans le sein de Marie. En cette aube nouvelle qui se lève sur le monde, Joseph a encore beaucoup à nous dire, sans dire. C'est que, malgré son silence, que dis-je, à cause de son silence, les évangiles font ressortir combien il est urgent d'entrer en soi pour lire le message divin alors que tout nous presse d'en sortir. En effet, l'expérience de vie de Joseph, dont témoigne le récit de Matthieu, nous fournit une clé pour entrer en nos profondeurs, unique chemin d'ombre et de ténèbres qui mène vers Jésus, Lumière du monde.

Ghislaine Salvail, sjsh


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