Vous êtes ici : Accueil / Texte Associé

Parabole une goutte de rosée

 C’était un jour éblouissant de soleil.
Le vent porte en bandoulière
Un lourd parfum de miel;
Il court le long des feuilles emperlées
Tout près d’un ruisseau
Et fait balancer
Une toile d’araignée
Alourdie de gouttes de rosée
Entre deux tiges de boutons d’or.


La plus scintillante de ces perles matinales s’appelle Christale.

Ivre de liberté et d’espace,
Elle goûte un tumultueux bonheur
À se remplir les yeux de lumière;
Elle ne cesse d’admirer
La beauté du monde
Dans sa bénédiction première
Et de dérouler le long métrage
De l’aventure humaine et cosmique
De cette communauté sacrée.

Soudain, un vent flâneur
Taquine le piège brillant,
Pleine de rires, Christale se berce…
Son cœur semble porter un éternel printemps
Et une pureté intacte.
Mais tout à coup, la toile d’araignée frissonne
Et sur la glèbe froide et humide
Tombe Christale.
Soucieuse, elle cherche maintenant le sens de son destin
Et sa nouvelle route de vie.

Elle offre le spectacle de luttes exaspérées,
De courants et de remous intérieurs.
Brusquement, une forme inconnue l’emporte
Vers un col étroit
Chargé de noir et d’épaisse ténèbre.
En dépit de son rude combat
Contre cette domination souveraine,
Christale ne peut reculer,
Elle suit alors le rythme précipité d’une route
Qui l’entraîne, malgré elle, vers une étrange aventure
Tandis que l’angoisse seule la distingue des morts.

Mais le hasard lui baise la main
Comme une tendre amie,
Le ruisseau coulant tout près, l’emporte
Vers de nouveaux horizons.
Christale décide alors de suivre son cours
À travers de nonchalants méandres
Qui glissent à travers des prés
Tramés d’une herbe déjà jaunie.
Mais elle se rend compte
Que l’eau dans laquelle elle a plongée
A perdu son innocence.

Ne voulant pas demeurer dans ce milieu pollué,
Dans un silence sourd de rêve
Christale circule alors, à course folle
À travers rivières et fleuves
Souhaitant enfin trouver un environnement meilleur.
Désespérée, elle s’élance avec fougue
Vers la mer infinie
Désirant enfin se bercer sur le vaste balcon bleu.
Mais on espoir est vivement déçu…
Lourde de tristesse, sa chevelure se mêle.
Dans le voile des ténèbres…
Dans les profondeurs de son être
Elle sait qu’elle ne pourra plus offrir aux vivants
La liqueur originelle
Du premier matin du Monde.

Depuis lors Christale se débat,
Elle crie, en vain, à tue-tête
Son vif désarroi et sa profonde inquiétude
Parce qu’elle ne reconnaît pas dans le Jardin
Le scénario original de la Création.
L’irresponsabilité des femmes et des hommes
Qui sont, à la fois, vent et souffle, eau et terre
A brisé le Cercle sacré de la vie.
Elle ne cesse de clamer qu’une réconciliation
Doit naître, en toute urgence
Pour que se marie définitivement
La communauté de la Planète
Avec celle des Humains : l’icône de la Trinité.

Lise Berger, sjsh
1996


Retour à la page précédente